Depuis plusieurs années, le CEA-Leti est un acteur majeur de la recherche, engagé dans le développement d’une souveraineté technologique à l’échelle nationale et européenne. Les travaux de l’équipe de Karine et Ivanie s’inscrivent dans ce continuum d’initiatives, dont l’objectif est de répondre aux besoins de la filière microélectronique d’aujourd’hui : des microprocesseurs à la fois plus petits et plus performants. Les développements réalisés dans le cadre de ce projet permettent notamment de renforcer les compétences européennes en procédés de fabrication microélectronique.
Karine Abadie est diplômée de l’Ecole de mécanique et microélectronique (ENSMM) de Besançon. Elle rejoint l’institut de recherche en 2011, où elle commence son parcours professionnel en tant qu’ingénieure intégration filière 3D, puis travaille à partir de 2013 pour l’équipementier EVG en tant qu’ingénieure procédé de collage rattachée au CEA-Leti. En 2020, elle intègre l’équipe du CEA-Leti dans la même thématique. De son côté, Ivanie Mendes a fait une spécialisation en nanosciences à l’école d’ingénieur de Grenoble-INP Phelma. Elle est arrivée au CEA-Leti en 2017, en stage de fin d’études d’abord, puis en 2019 pour travailler en lithographie.
La distorsion induite par le collage direct, caractérisée par scanner à immersion : une technique inédite
Nouvelle approche d’intégration 3D récemment développée, la technologie « back side power delivery network » vise à réaliser le réseau d'alimentation électrique des transistors par la face arrière de la puce (back side) plutôt que sur sa surface active traditionnelle, afin de gagner de la place dans l’architecture et augmenter la densité des transistors. Elle met notamment en œuvre le transfert de la couche de transistors d’un substrat de silicium à un autre, grâce à une étape de collage des substrats entre eux. Le défi introduit par cette approche est de pouvoir ensuite construire les niveaux supérieurs à partir de cette couche de transistors reportés.
La nouveauté introduite par les ingénieurs du CEA-Leti, qui fait l’objet de la publication IITC, est la caractérisation à l’échelle locale et globale des déformations induites par l’étape de collage direct sur les substrats. En effet, le collage direct est initié par contact des deux substrats en un point, puis il est basé sur la propagation d’une onde de collage durant laquelle l’air présent entre les deux substrats est expulsé. Cependant, une surpression de presque 3 bars est générée au cours de ce processus ! Et c’est précisément cette surpression qui va déformer les substrats l’un par rapport à l’autre, et générer des distorsions au niveau de l’interface de collage. L’enjeu en lithographie est donc de réussir à aligner les couches suivantes, malgré ces distorsions, et avec une précision de quelques nanomètres.
Pour relever ce challenge, l’équipe de Karine et Ivanie a développé une métrologie inédite mise en œuvre sur le scanner à immersion, en partenariat avec le fabricant ASML. Cette méthodologie permet de cartographier précisément les distorsions qui surviennent lors du collage. Un développement a été mené en parallèle avec l’équipementier EVG, afin de minimiser la contrainte induite au moment du collage.
Ainsi, à travers ce projet de recherche, une meilleure compréhension et une meilleure gestion des déformations liées au collage ont été amenées. Ceci permet au CEA-Leti de se placer sur une thématique amont pour résoudre des problèmes industriels dans le domaine de la microélectronique sur les nœuds avancés sub 10nm.
« Ce projet a mis en valeur les compétences scientifiques et techniques en procédé microélectronique du CEA-Leti, au service de nos partenaires industriels. » - Karine Abadie
« Grâce à cette collaboration, on dit souvent entre nous que la lithographie a permis de comprendre le collage. » - Ivanie Mendes